CONAKRY- L’année 2024 n’a pas été reluisant en Guinée en matière de protection des couches vulnérables. Plus de 200 cas de viols sur mineurs ont été enregistrés durant l’année écoulée. Pour parler de cette problématique, nous avons interrogé la directrice de l’office de protection du genre et des mœurs (OPROGEM). La Commissaire divisionnaire Marie Gomez tire la sonnette d’alarme.
COMMISSAIRE DIVISIONNAIRE MARIE GOMEZ : Pour ce qui est du bilan, nous avons réalisé pas mal d’activités courant 2024. Et vous le savez, il y a eu des cas de viols, des abus sexuels, des cas de séquestration, des cas d’enlèvement d’enfants mineurs, et les cas d’excision… Nous avons géré pas mal ces différentes infractions. Nous, nous sommes les agents chargés de l’application de la loi. Nous constatons l’infraction à la loi pénale, nous réunissons les preuves, nous arrêtons les présumés auteurs, nous les envoyons devant les différents tribunaux compétents. Mais à côté de cette répression que nous faisons, il y a la sensibilisation. Et d’ailleurs, dès l’avènement du 5 septembre, le chef de l’Etat a mis un accent particulier sur la protection des couches vulnérables. C’est pour cette raison que notre ministre de tutelle nous a instruit de faire une tournée dans les régions administratives du pays, afin de pouvoir expliquer aux différentes communautés, les conséquences liées aux violences basées sur le genre parce que, n’oubliez pas que tous nos textes de loi sont rédigés en langue française. La totalité de nos textes de loi, à savoir le code pénal, le code de l’enfant, le code civil, le code de procédure pénale…
Dans ces différents documents, les articles qui s’y trouvent, tout est en langue française. Donc il fallait aller dans les différentes régions du pays, expliquer cela avec les citoyens. Et cette tournée, nous l’avons effectivement effectuée. Mais nous avons commencé d’abord par la formation, le renforcement des capacités opérationnelles de nos agents qui sont sur le terrain. Les sept régions administratives ont été réunies à Kankan, pour pouvoir expliquer et apprendre aux différents officiers de police judiciaire, les techniques de rédaction des procès-verbaux liés aux violences basées sur le genre.
En termes de statistiques, que pouvons-nous retenir de 2024 ?
Du 1er janvier au 20 décembre, nous avons enregistré 212 cas de viol; 46 cas d’enlèvement d’enfants; 74 cas d’abandon d’enfants; 37 cas de séquestration; Coups et blessures 165 cas; Abandon de famille 170 cas; Harcèlement 21 cas; Mariage forcé et précoce 17 cas; donc nous avons déféré 10 cas; Enfant en conflit avec la loi, 40 cas; Enfant disparu, 40 cas; Menace, 43 cas; Outrage public à la pudeur, 9 cas; Incitation de mineurs à la débauche, 11 cas; Proxénétisme, 1 cas; Injure publique, 57 cas; Infanticide, 5 cas; Maltraitance 30 cas; Recherche de paternité, 6 cas; Violence conjugale physique, morale et psychologique 157 cas; Traite des personnes, 8 cas; Exploitation de mineurs, 12 cas; Mobilité, 26 cas; Et trafic d’êtres humains, 2 cas.
Nous savons que vous avez procédé à plusieurs interpellations. A date, quel est l’état d’avancement des dossiers devant les juridictions du pays ?
Les dossiers évoluent très bien. Les enquêtes évoluent très bien. On a déjà eu quelques interpellations. Mais pour des raisons de confidentialité, on ne peut pas dévoiler ça maintenant, jusqu’à ce que les officiers de police judiciaire terminent le travail.
En décembre 2023, lors d’un entretien avec Africaguinee.com, vous aviez annoncé des stratégies dans le but d’amenuiser les phénomènes de viol, violences et autres. Est-ce que vous avez gagné le pari ? Sinon, qu’est-ce qui n’a pas marché au juste ?
Quand nous comparons les chiffres de l’année 2024, à ceux de 2023, il n’y a pas grand-chose… Nous pensons que la population a pris conscience du fléau. La population a le courage de venir vers les services de sécurité (gendarmerie, police, etc.) mais, nous n’avons pas encore atteint nos objectifs. Nous souhaitons avoir zéro violence basée sur le genre. C’est notre objectif. Et nous ferons tout pour que ces présumés auteurs qui sont en train de semer la terreur dans la cité, surtout au niveau de la préfecture de Coyah et Dubréka, soient démantelés.
Je me pose cette question, moi-même. L’humanisme est terminé. Mais il faut que les parents nous aident. Un enfant, c’est une couche vulnérable. Il faut veiller sur lui. Moi je demanderai vraiment aux parents de beaucoup veiller sur les enfants et leurs mouvements. L’enfant n’a pas l’esprit de discernement. Quand votre enfant disparaît un moment, essayez de le retrouver pour ne pas que le pire arrive, on ne le souhaite pas. C’est malgré nous que nous voyons, nous entendons ces cas qui se passent ces jours-ci d’ailleurs.